Enseignements de printemps J6-Les pratiquants bouddhistes devraient-ils manger de la viande?
Sarnath, le 27 février 2013
Au 6ème jour de ses enseignements de printemps, le 17ème Karmapa Orgyen Trinley Dorje a été droit au cœur d’une question cruciale, non seulement pour que notre monde perdure, mais aussi en ce qui concerne nos vies de pratiquants bouddhistes. Gyalwang Karmapa a exploré ce sujet sous des angles différents et donné sa vision à propos de savoir si un pratiquant bouddhiste devrait manger de la viande ou pas, et si c’est le cas, de quand et comment cela peut être envisagé.
« Au cours d’un Kagyu Monlam précédant, j’avais abordé le sujet du végétarisme, ne plus manger de viande. Vous pourriez dire que c’était un avis à suivre, mais ce n’était qu’une suggestion. Plusieurs années se sont passées et j’ai entendu dire beaucoup de choses. Certains ont dit : « Oh, Orgyen Trinley Dorje a dit que si vous n’arrêtez pas de manger de la viande, vous n’êtes pas un Kagyupa! » En fait, ce n’est pas moi qui disait cela. C’était le 8° Karmapa Mikyo Dorje qui le disait . Ce n’était pas l’expression de mon point de vue, ce n’est pas comme si j’avais dit moi-même vous feriez mieux d’arrêter la viande sinon vous n’êtes pas un Kagyupa. »
Gyalwang Karmapa a poursuivi, il y a en fait différentes façons d’interpréter ce conseil du 8èmeKarmapa, Si nous interprétons plus légèrement les paroles de Mikyo Dorje, il est possible de dire que si nous continuons à manger de la viande, nous ne sommes pas un pur pratiquant Kagyu. « Beaucoup de grands maîtres Kagyu ont mangé de la viande, il est donc très difficile de dire simplement que si vous mangez de la viande vous commettez une faute. Mais manger de la viande est un sujet auquel, nous tous pratiquants du dharma, devons réfléchir consciencieusement.»
Gyalwang Karmapa qui est lui-même un pur végétarien a pris sa propre vie en exemple. « Lorsque j’avais parlé de ce sujet, je pensais d’abord à la manière dont je conduis ma propre vie. Je ne peux rien faire en ce qui concerne la façon dont les autres conduisent leurs vies, mais pour mon propre cas il y a plusieurs raisons à cela. » Il a ensuite expliqué les deux raisons essentielles qui le poussent à ne pas consommer de viande. La première est l’intense souffrance qu’endurent les animaux qui sont tués. Tous les jours, des millions d’animaux sont tués pour nous nourrir, et beaucoup sont soumis à cette fin à des conditions horribles . Quelques jours auparavant, Gyalwang Karmapa avait raconté que lorsqu’il était enfant au Tibet, et que des animaux étaient tués pour nourrir sa famille, il trouvait cela insupportable et ressentait pour eux une immense compassion.
La deuxième raison a-t-il expliqué est liée aux instructions du Mahayana, où tous les êtres sont vus comme notre mère. «Nous disons, je vais faire tout ce qui sera possible pour libérer les êtres de la souffrance. Nous disons je vais le faire. Nous en prenons l’engagement. Nous prenons le vœux. Puis une fois ce vœux pris, sans plus penser à rien, nous mangeons de la viande, et cela ne va pas. Nous devons y penser consciencieusement. »
Gyalwang Karmapa a ensuite reconnu qu’il y a des circonstances dans lesquelles manger de la viande est possible et même nécessaire. Il a expliqué que dans le Vinaya, les règles bouddhistes des moines et des nones, manger de la viande est autorisé en cas de maladie, mais seulement lorsque trois conditions sont réunies : il ne faut pas que les personnes malades aient vu, entendu ou pensé que l’animal a été tué pour qu’elles le mange. La viande est autorisée quand quelqu’un est malade ou pour des personnes dont la santé nécessite une alimentation qui en contient.
« Mais lorsque vous mangez de la viande dans ces situations, vous ne devriez pas manger de façon ordinaire. Vous devez d’abord méditer sur la compassion – compassion pour tous les êtres en général, et spécialement pour l’animal dont la chair est en face de vous. Ensuite vous devriez réciter le mantra du nom de Bouddha et des mantras qui purifient les actes négatifs. Seulement après cela vous pouvez commencer à manger la viande. »
Ces conseils ne se sont pas arrêtés là. En revenant sur les instructions du Mahayana de voir tous les êtres comme des mères, Gyalwang Karmapa a poursuivi. « Lorsque vous commencez à manger la viande, vous devez y penser de façon particulière. Vous devriez penser que c’est la chair de votre mère, de votre père ou de votre enfant. Vous devriez manger en pensant à cela, et lorsque vous pensez que la viande devant vous est la chair de votre mère ou de votre enfant, ce n’est qu’à ce moment que vous pouvez la manger. »
Nous devons aussi avoir une motivation pure lorsque nous mangeons de la viande. « Nous ne devrions pas manger de la viande parce que nous l’aimons, parce qu’elle est délicieuse. Nous ne devrions pas manger parce que nous nous réjouissons de la saveur de ce que nous mangeons. Nous devrions seulement manger de la viande pour rester en vie. »
Pour éviter tout mal entendu, Gyalwang Karmapa a répété que chacun doive profondément réfléchir à ce sujet: « Cependant, je n’ai pas dit qu’il faille arrêter immédiatement de manger de la viande. Je comprend que c’est difficile d’arrêter. Mais j’ai dit que nous devons y penser consciencieusement. Si nous mangeons de la viande, et si nous sommes entrés sur le chemin du Mahayana, si nous sommes quelqu’un qui a commencé à réfléchir au fait que tous les êtres sensibles ont été nos mères, nos pères ou nos enfants, si nous pratiquons de cette façon, alors nous devons considérer ce sujet très consciencieusement. »
